Pedal to the metal, le cuir des gants se frotte à celui du volant et les pupilles inébranlables fixent la route sous ses sourcils froncés en une concentration ultime. Malgré toute sa diligence et son expertise, c'est avec une précaution inhabituelle qu'il traverse son quartier en cette nuit. À voir la voiture défiler si lentement, on lui collerait une étiquette de conducteur parfait qui ne dépasse jamais les limites imposées ; étiquette qu'il ne revêt qu'en la présence de l'invitée spéciale qui s'approprie le siège passager du véhicule. Toujours le même sens du devoir envers elle, cette responsabilité de donner le bon exemple à Byeol. Son grand-père l'y a sans doute exposée bien avant l'arrivée de Gun, mais il ne lui souhaite pas son mode de vie et tente de l'en garder aussi loin que possible. Alors c'est tout lentement que les roues foulent l'espace du terrain oublié, négligé en cette nuit par les pilotes enhardis. Gun quitte la voiture et, d'un coup de tête, invite Byeol à en faire de même. « Catch, » souffle-t-il avant de lui jeter les clés de la voiture volée – peu importe tout l'amour et la confiance qu'il épreuve envers la demoiselle, il ne comptait tout de même pas sacrifier sa Ford Torino pour elle. « Tu sais toujours mettre le contact ? » Demande aussi innocente que narquoise. Les leçons ont il y a des années commencé, pourtant elles semblent ne jamais être retenues.

Byeol, elle sait beaucoup de choses. Elle sait rouler en rollers. Même à vélo. Elle sait aussi rouler des nems, des rouleaux de printemps. Même des joints, elle sait les rouler. Mais alors faire rouler une voiture, ça… Seul truc qui échappe à son palmarès. Le permis, ça coûte fucking cher et, honestly, pas comme si elle avait l’argent pour se payer une voiture anyway. Mais était-ce une raison pour ne jamais prendre la moindre leçon de conduite ? Nop. When life gives you lemon, you make some lemonade. La vie lui avait donné Gun, alors elle en avait fait son moniteur de conduite. Ce n’était pas la première fois qu’il lui apprenait à conduire. Ni la dernière, probablement, vu la vitesse à laquelle ils avançaient. Non pas que Byeol était par nature une mauvaise conductrice, qu’elle n’apprenait pas vite… Le problème, c’était plutôt que la brune se prenait beaucoup trop pour Van Diesel. Fast and Furious n’est qu’un film, et ça, elle a du mal à s’y faire. Elle aimerait conduire vite, comme dans les movies. Accélérer, faire des dérapages. Hors les policiers de Séoul n’étaient probablement pas très d’accord avec la vision qu’elle se faisait de la route. « Fous-toi de ma gueule. J’conduis très bien en vrai, c’est juste vous tous là avec votre vision archaïque du code de la route. » Attrapant les clés à la volée, elle s’installa côté conducteur, impatiente. Et ofc, le contact, elle savait le mettre. Par contre, lorsque le temps vint d’enclencher la première… C’est avec une marche arrière qu’ils se retrouvèrent. Une marche arrière musclée, heureusement qu’il n’y avait personne dans ce parking. « … C’est parce que j’voulais d’abord reculer la voiture. » Mauvaise foi ? Never. Pas son genre. Du tout. « C’est la bagnole de qui ça ? La tienne ? » Non parce que, elle préférait savoir… Juste au cas où.

l'amusement se lit sur ses traits, incapable d'être exaspéré même lorsque tous ses enseignements s'avèrent futiles. ses remarques sont elles aussi empreintes de tendresse, la voix rieuse et légère lorsqu'il souligne le manque d'assiduité de la demoiselle. l'indignation de byeol est encore plus amusante et gun réprime à peine un pouffement de rire devant ses arguments. sa vision de la conduite est plus anarchique qu'archaïque, mais il ne prend pas la peine de rétorquer et s'installe en silence au siège passager, la ceinture de sécurité immédiatement bouclée. son regard est rivé sur la demoiselle, prêtant une attention immense à la moindre manoeuvre de la plus jeune. sa concentration ne rend le choc de sa tête contre le siège que plus surprenante et il s'appuie tout de suite sur le toit de la voiture, grognant au coup qu'il vient de se prendre à cause de la maldresse de byeol. il garde tout de même son calme - il a vécu bien pire que ça, au contraire, c'est avec les sourcils haussés et les yeux taquins qu'il se tourne pour entendre les explications de byeol. « pour quoi faire ? » question piège, parce que rien ne pourrait justifier de façon crédible ce qu'elle venait de faire. « bien sûr que non. » le ton presque dédaigneux alors qu'il se réajuste dans son siège et s'assure que sa ceinture ainsi que celle de l'apprentie sont bien bouclées. réponse significative, byeol sait déjà le risque que n'importe quel véhicule qu'on lui confie prend. « réessaie. » le regard rivé droit sur la route dans laquelle il espère byeol capable de s'engager correctement, cette fois-ci. il lui offre une autre chance — sûrement pas la dernière.

Byeol n’avait jamais été très douée pour conduire. Seriously. Petite, elle rentrait dans tout le monde avec son 4x4 électrique. Et puis ensuite, elle a terrorisé les gosses du quartier avec son vélo. Une vraie terreur de la route, la brune. Mais fort heureusement, elle avait son oppa, hein. Un adorable oppa, très patient, qui lui prêtait sa voiture et lui apprenait à conduire depuis… Depuis combien d’années déjà ? Probablement beaucoup trop, beaucoup trop pour qu’elle puisse continuer à faire des bêtises pareils. « … Pour mieux aller vers l’avant. Tu sais, comme quand tu fais du tir à l'arc. D'abord tu recules. » Aha. Question piège, peut-être, mais pas à Byeol. Byeol, elle a toujours réponse à tout, tout le temps. C’est que le pauvre papy Gun s’était arraché les cheveux - l’autre Gun, vous savez, le vieux Gun - en essayant de la punir lors de très rares fois. Elle avait toujours des justifications et des explications toutes prêtes. Peut-être aurait-elle fait une très bonne avocate si elle s’y était aventurée. Affichant une petite moue, Byeol le regardait ré-arranger sa ceinture et la sienne. Comme si elle était un danger public. Franchement. Elle ? Dangereuse sur la route ? Jamais, c’était juste une petite erreur de parcours non reconnue anyway. Alors elle se remit au travail, et passa donc la première, afin d’enfin avancer cette fois-ci. Non sans un grand sourire victorieux, du style tout ceci était un plan depuis le départ et, tu n’aurais pas dû me sous-estimer. « Si je passe le permis tu m’aides à trouver une bonne voiture par cher ? Je t’emmènerai aux soirées trot avec papy Gun. » Elle lui adressa un clin d’oeil avant de rire, parvenant à faire un tour complet du parking sans dégâts. C’est que ça lui donnait des ailes. « Alors, oppa ? Gun ? Gunny ? T’as quelqu’un en vue ? Vas y t’inquiète tu peux te confier j’répéterai tiens, tu m’connais. » Quoi ? Fallait bien faire la conversation. Et elle était curieuse. Elle avait envie de manger une part de gâteau de mariage. Donc si quelqu’un pouvait se marier se serait fort cool.

dès le début, le résultat était prévisible. gun connaît byeol, presque aussi bien qu'il ne connaît les ruelles de hanseong. la leçon n'allait pas se dérouler paisiblement avec elle et c'était clair dès le début. son regard ne dévie pas du sien, peu impressionné par son explication, une lueur de confusion brillant au fond de ses pupilles. il ne prend pas la peine de répliquer, reporte son regard sur la route après avoir ordonné à la brune de retenter le coup. malgré ses traits toujours placides, on peut y délier une certaine fierté lorsqu'elle réussit la manoeuvre -- parfois, il suffit que les commissures de ses lèvres se lèvent d'un dizième de centimètre pour qu'on voit la différence, tellement on était habitué à l'air de marbre. « tu peux garder celle-là, si elle reste entière d'ici la fin. » les taquineries qui ne cessent pas, pourtant. même si byeol venait de l'impressionner, elle avait encore ses preuves à faire. « je vous attendrai dans le parking, » répond-il à sa proposition, bien que ce ne soit pas qu'une plaisanterie, cette fois-ci. quand bien même il les adore, il ne se voit pas rejoindre ce genre d'activités, ce n'est tout simplement pas lui. il se détend instinctivement lorsque byeol commence son tour du parking, maîtrisé jusque là. son attention reste tout de même braquée sur sa conduite -- ce qui ne rend sa surprise que plus grande lorsqu'elle lui pose la question inattendue. « non. » réponse instinctive, celle qu'il donnait quasiment toujours, même quand ce n'était pas une question de oui ou non. ses joues chauffent malgré lui, l'esprit déjà inondé de pensées du doux regard qui le suivait parfois au garage, des plaisanteries qui s'ensuivaient. chatouillé par les vestiges des douces caresses échangées quand il n'y avait qu'eux deux. « c'est mon ami, » qu'il renchérit. pourtant, elle ne lui a rien demandé.