la nuit a jeté son voile sur la ville, pourtant elle ne cesse de briller sous les néons des bars. les étoiles se font absentes dans le ciel, invisibles sous tant de lumières pour leur voler la vedette, alors junha les a guidé plus loin. ils se sont éloignés des grandes rues pour atteindre les hauteurs du quartier, sur un chemin en pente. les bâtiments se font moins fréquents, quelques maisons modestes parmi des terrains laissés à l’abandon, en travaux pour une durée éternelle. des échanges se font ici, à l’ombre des réverbères. ça reste pourtant l’endroit le moins dangereux qu’il ait connu et c’est pour sa sérénité qu’il l’a choisi pour destination. il voulait seulement voir le ciel briller ce soir, il voulait seulement un peu de silence autour d’eux pour une fois. plus ils avancent et plus la nuit les recouvre, bientôt plus éclairés que par la bonté de la lune. au loin, les échos de la ville parviennent jusqu’à eux tandis que les criquets deviennent leur seule compagnie. junha s’arrête devant l’entrée fracassée d’un bâtiment, délaissé depuis que son activité a été signalée. un refuge illégal qui offrait le confort d’un lit sans rien débourser, mais aujourd’hui, c’est devenu un lieu de rassemblement. les murs ont été tagués et des bouteilles vides décorent le sol. il s’amuse à shooter dans une canette en traversant la pièce, mais elle n’était pas tout à fait vide. « fuck, my shoes! » alors que des morceaux de verres brisés se reflètent avec la lune, junha balance son bras derrière lui pour saisir celui de sieon et trouver sa main. « let’s go upstairs. » il évite tous les obstacles avec précaution et guide son ami à travers ce taudis, dans lequel il aurait presque honte d’admettre y avoir passé des nuits, si sieon ne connaissait pas déjà sa situation. « it’s so quiet… what if there’s a creepy psycho living here? » il chuchote soudain, arrêté dans les escaliers de bois qui pour accentuer le cliché, grincent sous leurs pieds. il presse alors la main du plus grand sans pitié, puis se met à courir jusqu’à l’étage en entrant dans une pièce au hasard. « gotcha!!! … no one? okay fine, i guess we’re alone. » il hausse les épaules, comme si ses actions avaient du sens et relâche enfin son partenaire pour faire un tour de la pièce. il n’y a qu’un vieux bureau et un matelas poussiéreux, et au-dessus d’eux, une faille au plafond qui leur offre une vue sur le ciel. « hey sieon, did you ever sleep under the stars? » il demande sur un ton ironique, parce que ce n’est pas tellement la vision qu’il se fait d’une vraie nuit à la belle étoile. et finalement quand son regard s’arrête sur le plus âgé, il se rend compte de l’image misérable qu’il renvoie. il a eu de mauvaises expériences bien sûr, mais pas ici et pas si souvent. pourtant il baisse la tête tout en gardant le sourire.

sans la moindre hésitation, les pas de sieon suivent ceux du plus jeune à travers les bâtiments qui se délabrent au fur et à mesure qu'ils les dépassent. ses addictions l'ont mené des clubs les plus luxueux aux pires taudis, pourtant ce soir tout est si nouveau pour lui. sieon est invité à découvrir le monde d'un autre et partager son secret, loin des escapades dénuées de sens lors desquelles il se perd souvent. sa témérité motive son enthousiasme mais l'attendrissement y est aussi pour quelque chose et c'est avec émerveillement qu'il regarde autour de lui. son attention ne revient vers son ami que lorsqu'il shoote dans une canette pleine et il explose de rire, glisse un dumbass à peine discret en le suivant. « it's not like you're leaving me a choice. » haussement d'épaules indifférent, sieon ne s'oppose pas à l'idée de toute façon. il grimpe les marches sans lâcher la main du plus jeune et s'avance en prêtant une attention particulière à ses pas pour s'assurer que ses chaussures ne finiraient pas dans le même état que les siennes. « the only creepy psycho i see is you. » lance-t-il en un souffle taquin, amusé par l'inquiétude soudaine de junha et les phalanges qui se resserrent autour de sa main. sans avoir le temps de le réaliser, il est entraîné à la course à travers l'étage et il ne peut que suivre le plus jeune malgré le cri de protestation qu'il lâche. « you sound suspiciously happy about it. you brought me here to murder me, didn't you? » sieon ricane lorsqu'il constate que le décor serait parfait pour un meurtre. pas grand-chose à admirer, au final, juste des murs qui s'effritent et du  mobilier moisi. pourtant son enthousiasme ne tarit pas, il reflète plus calmement celui de junha, les lippes étirées en un sourire profondément amusé lorsqu'il lève la tête pour constater l'énorme faille dans le plafond. « fuck, this place is even more of a disaster than i am. » mains sur les hanches et le rire léger, toujours prêt à se tourner en blague pour ne pas se laisser le temps de réaliser la gravité de son cas ni d'être pris en pitié. il repose son regard vers junha à sa question et se retrouve à y penser pendant un moment. « uuuuuuuh, hésite-t-il, sourcils froncés alors qu'il tente de se remémorer une quelconque occasion, i probably passed out on someone's lawn at some point. dunno if that counts. » nouveau haussement d'épaules, indifférence totale face aux péripéties qu'il vit. elles ne l'amusent même plus, mais il ne l'avouera jamais ; ce serait se rendre au vide. ses jambes fines fatiguées d'avoir fait tout ce chemin pour arriver jusqu'ici, il se laisse tomber sur le vieux matelas et y réagit immédiatement avec un dégoût profond. « i swear to god junha, if something crawls out of this mattress while i'm on it i'm gonna murder you and stuff you inside. » sa grimace reflète son écoeurement mais il ne bouge pas pour autant. il tapote la place à côté de lui et se penche en arrière, prenant appui sur ses mains pour regarder le petit bout de ciel qui leur est offert en attendant que junha le rejoigne. « anyways, i don't think i've ever done that properly. i guess now's our chance? » la tête penchée sur le côté et le sourire étincelle qui reflète celles des étoiles.

c’est un peu comme s’il dévoilait une partie de lui-même ce soir. un peu comme s’il apaisait son coeur en se débarrassant des zones les plus sombres, les plus secrètes. cet endroit pourrait presque ressembler à sa vie, laide et fragile ; tout se casse la gueule et personne ne s’en préoccupe. qui voudrait retaper de telles ruines ? il faudrait tout démolir et repartir à zéro pour en faire une merveille. recommencer. avec sieon derrière lui, il rejoint l’étage à toute vitesse et se voit soulagé de n’y trouver aucun squatteur. il écoute sieon plaisanter au sujet d’un meurtre et pour jouer le jeu, se retourne lentement vers lui. un sourire trop large barre son visage. « who knows… i could’ve lied all along and you still followed me in a middle of nowhere. » il réalise à mesure de ses mots, une vérité étonnante. sieon l’a suivi sans méfiance et s’il avait eu de mauvaises intentions ? il pouffe de rire et lève le masque. « your fault if you die tonight. » il se pose alors près de la fenêtre pour lever les yeux au plafond ou plutôt, vers le morceau de ciel visible à travers la faille. « it is indeed. this place can’t be fixed. » eux le pourront un jour, il en est sûr, même si ce n’est pas pour lui qu’il s’inquiète le plus. et son regard s’arrête sur le plus grand, la curiosité débordante.

s’évanouir dans un jardin n’est pas vraiment ce à quoi il pensait, mais la réponse le fait rire et il secoue la tête, exaspéré. ils pourraient passer une nuit sous les étoiles durant l’été, il leur suffirait d’une couverture et de quelques bières, un parc municipal et le tour serait joué. qu’ils aient le droit ou non, il s’en fiche. sieon le sort de ses réflexions en se plaignant du matelas et pour ajouter à son stress, il y donne un coup de pied juste pour être sûr. « oh my god… you’re such a baby!! it’s only dust. » pourtant il hésite à s’y asseoir, comme s’il laissait à sieon l’honneur d’en tester la sécurité. il jette un dernier coup d’oeil vers la porte et une fois serein, rejoint son ami sur le matelas poussiéreux. il étend ses jambes et s’attarde sur un sourire, une seconde de trop. « i guess. » il lève la tête vers le ciel et son sourire revient. « but we’ll do it for real another time! » l’ambiance est paisible, presque trop et le silence est confortable, mais junha est un gamin. junha se sent d’humeur taquine, il laisse quelques minutes passer et quand il va pour s’allonger, il se redresse aussi vite en gueulant. « sieon i felt something!! rats?! cockroaches?!! here, look!! » il roule hors du matelas et s’éloigne du plus âgé pour secouer ses vêtements et ajouter au drame. il attend, attend et attend encore avant de craquer sous les réactions de son partenaire. il éclate de rire purement et simplement, plié en deux au milieu de la pièce. « sorry, woah i’m a kid. don’t kick me. » il revient pour sauter sur le matelas à pieds joints, peu enclin à se poser tranquillement ici, comme si ce n’était pas le bon endroit.  

« i mean, everyone knows i have a death wish. and this is a pretty sexy way to die, if you ask me. » le ton plaisantin pourtant il le pense réellement : assassiné par un beau gosse dans un immeuble abandonné, c'est pas si mal comme fin, on parlerait de lui dans les journaux pendant des mois.

(pas assez fort pour s'ôter la vie, alors il frôle la mort le plus près possible. convaincu qu'il n'y a rien à perdre s'il perd la vie, ni pour lui ni pour autrui.)

alors il ne recule ni ne s'arrête en suivant son compagnon ; l'état des lieux le dégoûte beaucoup plus que l'idée de s'y faire tuer. son enthousiasme ne se dissipe que lorsqu'il se laisse tomber sur le matelas en décomposition, inquiet de ce qui pourrait bien s'y cacher, comme ses menaces le montrent. « shut your bitch ass up! dust is disgusting. » maugréé-t-il comme s'il faisait le ménage tous les jours. au final il n'y a pas une grande différence entre sa propre maison et cet endroit. la déco est plus sympa et la maçonnerie en meilleur état, pourtant les deux donnent l'impression d'être habités par des zombies -- espèce dont sieon ne diffère pas tant que ça, au final. malgré tout il finit par trouver son aise, installé aussi confortablement qu'il le peut. son regard se lève vers les étoiles et il se surprend à sourire, le coeur allégé comme s'il se trouvait dans un autre monde. un où tout va mieux. « yeah, i think that would be nice. » murmure doux, le vrai sieon qui brille à travers ses fissures. il se laisse border par la sérénité du moment, ses pupilles illuminées par la voûte céleste qui s'y reflète. jusqu'à ce que junha ruine tout. « what the FUCK-- » cri presque hystérique alors qu'il bondit de sa place et secoue frénétiquement ses vêtements, tapant du pied et sautillant sur place pour faire tomber tout ce qui aurait pu lui ramper dessus. il aperçoit enfin la malice du plus jeune pendant un bref moment de lucidité et un long soupir s'écoule de ses lippes. « i'm gonna beat your ass, i swear to god. » et il s'exécute aussitôt, son poing s'écrasant sans retenue contre son épaule. il se laisse tomber en face de lui à même le sol -- au moins il peut voir ce qui y croule -- le temps de reprendre son souffle, la main sur le coeur telle la drama queen qu'il est. « by the way we're NOT spending the night here, just so you know. » la phrase à la première personne du pluriel, parce qu'il ne comptait pas laisser junha lui échapper ce soir.

« it's not a sexy place though... » ils avancent toujours sur l'escalier grinçant et après réflexion, junha comprend l'allusion. « oh. the killer's sexy, i get it. » un petit sourire malgré le lourd sous-entendu de ses propos. a death wish. la tristesse dans son sourire, mais la détermination dans son regard et il se promet de lui ôter cette envie de la tête. il ne le connaît pas encore si bien, mais il ne peut nier l'intérêt qui le pique à son sujet depuis leur rencontre. il y a un espèce de quelque chose qui rend la présence de sieon confortable et qui le met en confiance, à raison ou non. les plaintes du bel homme l’amusent malgré la vulgarité qui sort de ses lèvres. « excuse me, your highness but there's dust everywhere. » il accompagne son affront d’une jolie courbette avant de le rejoindre. le matelas s’affaisse sous leurs poids et la vue du ciel étoilé les happe un instant, junha rendu rêveur et sieon aussi, sans doute. il y a dans leur silence, le poids de leurs fardeaux qui chaque jour les tourmentent avec d’un côté l’optimisme, et de l’autre le désespoir. complémentaires. un sourire brille sur les traits du plus grand et junha, peu doué en sentiments, choisit de ruiner l’instant en le trompant. il y aurait des bestioles selon lui et il se lève même pour jouer le mensonge jusqu’au bout, ravi de voir que son ami marche à fond. la plaisanterie n’était pas là pour durer et ainsi junha se dévoile assez vite, son rire résonnant dans la pièce face aux menaces du plus grand. « you can try- ow! » pas l’temps d’esquiver le coup, mais c’est une douleur méritée qui lui vrille l’épaule. « fuck, you’re stronger than i thought. » il se masse l’épaule pendant que sieon s’écroule devant lui, la main sur le coeur comme s’il venait de courir un marathon. « ..nevermind, forget what i just said. » taquin encore, mais il reprend son sérieux quand sieon lui déclare ne pas vouloir passer la nuit ici. il s’accroupit à hauteur de son visage, l’expression tendre et le sourire défaitiste. « yeah i don’t really want to either, to be honest. » mais il voulait rester avec toi, sieon. « at least it was funny. 'guess we’ll go back in town, then. » il hausse les épaules, n’ayant pas compris le sens des paroles et il se redresse avant de lui attraper les deux mains. il l’aide ainsi à se relever non sans tirer trop fort et l’amener contre lui, l’obligeant à lâcher ses mains pour les stabiliser tandis que ses jambes vacillent, mais l’accident est évité. « come on, we should go! » grand sourire et tape dans le dos, l’artiste part devant dans l’espoir de s’aérer l’esprit plus vite et se débarrasser de ce sentiment gênant qu’est la déception.

le rire à peine réprimé, amusé que junha relève le sous-entendu auquel il n'avait même pas pensé. le vrai sens de ses mots qui s'envole sans trop s'éloigner, comme un vieux démon auquel il a appris à se faire. il suit le plus jeune sans broncher, s'installe à ses côtés malgré le dégoût qu'il n'hésite pas à exprimer — et exagérer.  « eat my ass, » réplique-t-il sans attendre. on ne lui enlèvera pas le droit de se plaindre et il compte bien en abuser coûte que coûte, même si la vue des étoiles l'apaise rapidement. et il se perd à les observer, à se sentir si petit sous la voûte céleste infinie, ses soucis semblant eux infimes. si tout l'était réellement, si le poids qu'il portait était aussi léger il aurait peut-être la force d'avancer. et il soupire en s'imaginant une autre réalité où tout serait moins grave. souffle transformé en cri par l'audace de junha contre laquelle il se révolte rapidement d'un coup de poing à l'épaule. « i'm fueled by pure rage and deep hatred for myself and everything around me. » l'être aigri par ce qu'il a subi et il ne craint pas de l'admettre devant junha, ce quasi inconnu devant qui dévoiler son âme semble pourtant si facile. il roule les yeux à la remarque, se remet à peine de ses émotions avant de décider que finalement il ne comptait pas rester ici. « ugh, no, i don't feel like going back outside. » soupir étrange venant de la part de celui qui fuit constamment les quatre murs de son appartement pour que sa solitude et ses échecs ne l'y rattrapent pas. peut-être que c'est la présence de junha qui rend tout environnement supportable. et dans son confort il ne décèle même pas la déception du musicien qui pense que leurs chemins vont maintenant se séparer. « we're gonna go chill at my place for a while. i don't remember whether i fed naughty wilbur or not so i should probably check on him anyway, » murmure-t-il distraitement, le plan déjà tracé dans sa tête. il ne comptait évidemment pas laisser le choix à junha ; à son tour de le traîner où il veut sans qu'il ne puisse résister. leurs mains liées le prennent par surprise et il se relève maladroitement, chancelant sur place avant d'être stabilisé par le jeune homme. un sourire large étirant ses lippes, attendri par cette interaction.

« yeah, let's go. » le sourire s'empreint de douceur et il rattrape rapidement le plus jeune pour entourer ses épaules de son bras et l'attirer contre lui alors qu'ils quittent l'immeuble en ruines. « by the way, you can spend the night over. i promise you, my bed is a lot more comfortable than whatever the fuck you just had me sit my ass on. » argument en béton contre lequel junha n'a aucune chance. leurs pas les mènent vers la voiture que l'aîné avait laissée plus loin et il s'empresse de se mettre derrière le volant, sa conduite terrible empirée par l'enthousiasme de rentrer chez lui ; son chien lui a manqué, mais c'est surtout le fait d'y ramener junha qui lui apporte le sourire, comme quand on ramène un nouveau matelas ou tout autre objet susceptible de rendre les lieux plus vivables. ils y arrivent après à peine quelques minutes de conduite affligeante ; à peine les clés tournent-elles dans la serrure que le petit chien se rue à la porte et sieon se met immédiatement à genoux pour l'accueillir, les caresses se perdant sur sa fourrure douce tout en roucoulant comme s'il n'avait pas vu son adorable boule de poils depuis des siècles. il prend le yorkie dans ses bras et se relève, un sourire de papa fier aux lèvres alors qu'il le présente à son ami. « junha, meet naughty wilbur. »

il ne le connaît pas autant qu’il aimerait et l’envie d’y remédier se fait plus forte à chaque rencontre, à chaque fois qu’ils rient et se chamaillent comme s’ils avaient grandi ensemble. il le regarde comme s’il comblait un manque dans sa vie, comme s’il désirait avoir ce genre d’ami là maintenant, alors qu’il s’en fichait il y a des mois. il n’a que son frère à énumérer et sans ce lien de sang qui les unie, il l’aurait probablement laissé filé lui aussi.. junha qui n’a jamais réellement su faire confiance, toujours menacé par les trahisons, les faux semblants. la brigade ne lui a offert que des rivaux et il en est ressorti méfiant, son coeur dévoué à la musique et elle seulement. mais sieon est marrant, sieon lui a donné de l’argent et bon sang, il s’en veut de l’avoir revu pour cette raison ((la première fois, juste celle-là)). le sourire que sieon destine aux étoiles paraît si pur qu’il en devient aussi bien curieux qu’envieux envers les astres. à eux il se dévoile. et à d’autres peut-être, mais junha n’est personne. il lui tient compagnie au creux de la nuit, l’alcool dans les veines ou l’adrénaline comme ce soir en ces lieux. il aurait pu lui poser des questions sur sa vie ou chercher des réponses à ses nombreux pourquois, mais ça voulait dire se dévoiler aussi. alors jun a préféré se jouer de lui et l’effet désiré n’a pas manqué de le faire rire, peu soucieux d’avoir brisé le moment. dans les taquineries, sieon lui dévoile quelque chose d’assez subtile, mais tristement évident à la fois et il le rejoint au sol, accroupi près de lui. « what is there to hate? » il sourit en touchant l’épaule du plus grand et même s’il peut comprendre ce genre de paroles, il n’en sait que trop peu pour insister. puis le sujet change trop vite et junha comprend juste que leurs chemins se sépareront, avant même d’en avoir la confirmation. il l’entend marmonner à propos de son chien et autres plans de détente, mais il n’en réalise toujours pas le sens avant de trébucher sur lui et de se diriger vers la sortie. l’accolade est bienvenue surtout lorsqu’il entend enfin l’invitation de sieon à rester chez lui. « wait.. what? oh. dude i’d die for a super comfy bed right now… thanks? » il ne connaît que l’inconfort d’une chambre minable qui ne lui coûte presque rien, une solution temporaire jusqu’à… ce qu’il prenne une décision. problème majeur qu’il remet toujours au lendemain. continuer à vivre ainsi et jouir de la musique, ou tout laisser derrière, y compris sa fierté et retourner chez eux ? ces pensées le rongent durant le trajet et il n’a pas vu les minutes passer lorsqu’ils sortent déjà de la voiture. junha suit son hôte et ce n’est qu’à l’apparition du petit chien qu’il revient à lui. l’animal est adorablement heureux de revoir son maître et junha ne peut retenir un sourire, surtout lorsqu’on le lui présente. « hi cutie, nice to meet you. » il caresse naughty wilbur et lui gratte même les oreilles avant de s’intéresser à l’appartement dans lequel il entre. il retire ses chaussures à l’entrée et ses pas se font hésitants jusqu’au salon. il a beau se montrer sans filtre auprès de sieon, il a comme l’impression d’être entré dans son intimité et c’est une première barrière qui s’affaisse déjà. un petit pas vers la destination qu’il leur souhaite, s’il ne gâche rien. « i guess it’s a cute place, for what i know. » le ton taquin, il hausse les épaules et s’approche des meubles pour tout regarder, tout toucher et finalement s’arrêter dans la cuisine. « poor thing!! there’s nothing in there. oh my god, you let him starve! » il désigne les gamelles avec une fausse indignation et monte même dans les aigus pour rendre sa déclaration plus dramatique. ses traits changent alors quand il cherche naughty wilbur du regard, adoucis et ses lèvres pincées ajoutée à son allégresse le rajeunissent. il cherche l’attention du chien en ouvrant les bras, prêt à remplacer ceux de sieon si on le lui autorise.

secrets suspendus entre eux, accrochés aux étoiles qui les surplombent. la vue n'en est pas moins resplendissante et sieon se laisse happer par les pensées dans lesquelles elle l'entraîne avant que junha ne le tire de son côté. les injures éclatent et les rires aussi, le monde du musicien bien plus joyeux que celui dans lequel il s'apprêtait à se perdre. « ugh, don't even get me started. » sinon, il commencerait par lui-même. lui et ses doutes, lui et ses mauvaises décisions qui l'ont mené jusque là.
jusque là.
là, aux côtés de junha.
peut-être que s'il n'avait pas tant merdé, il n'aurait pas eu besoin de le rencontrer, de chercher son réconfort. mais sieon aime le temps passé avec junha. il aime sa spontanéité et son énergie, la magie d'ignorer le destin les mènera sans avoir à le craindre.
et naturellement, il ne veut pas s'en séparer. même lorsqu'il décide de quitter les lieux, il fait en sorte que le plus jeune reste à ses côtés. « you're welcome. and you won't even have to die for it! not tonight, at least. » pour rester dans le thème assassin de la soirée. sieon les conduit chez lui en une pièce, heureusement, ce serait dommage que junha n'ait pas l'occasion de rencontrer naughty wilbur, encore plus que ce dernier passe le reste de sa vie à se demander où son ami — parce que sieon n'aime utiliser le mot "maître" qu'avec les humains — peut bien être. quand le chien les approche, sieon partage son enthousiasme et il prend son temps pour lui faire des caresses avant de le présenter à junha qui semble tout aussi excité que lui.

« oh, fuck off, » répond-il avec un roulement d'yeux au compliment vache. il regarde junha découvrir les lieux du coin de l'oeil, sourire attendri aux lèvres alors qu'il se déchausse puis se défait de son pantalon qu'il abandonne sans égard sur un meuble au hasard. « don't you fucking dare— » il démarre tout de suite devant l'air faussement indigné du musicien, son regard partagé entre lui et le chien qui en profite évidemment pour remuer de la queue et gémir tristement. sieon fronce les sourcils et se tourne vers son ami, l'air plus sérieux que jamais. « look, i don't mind spoiling my dog because he fucking earned it— you did, didn't you? yes you did, you baby. » derniers mots cassant complètement son regard sévère, prononcés d'un ton béat alors qu'il se baisse vers le chien pour le caresser affectueusement avant de se relever et coincer jun contre le comptoir de la cuisine ouverte. « but what i won't stand for is you implying i'm a bad owner in my own home! » dramatique jusqu'au bout, il hausse la voix et agite l'index de façon menaçante devant son visage. n'importe quoi croirait à une réelle scène de ménage, sieon parfait dans le rôle de la mère de famille instable, divorcée depuis une décennie et avec un penchant pour le vin rouge.

il n'a pourtant d'autre choix qu'obéir et c'est sans réprimer le moindre soupir ou grognement — il joue l'adolescent irritable tout aussi bien — qu'il pioche le sachet de croquettes au fond du placard, naughty wilbur beaucoup trop occupé à quémander des câlins à junha pour s'en rendre compte avant que sa gamelle ne soit remplie. une fois la chose faite, c'est au tour de ses propres besoins d'être satisfaits. « you want a drink or something? » demande-t-il en ouvrant son frigo où résident quelques légumes, des sauces et beaucoup trop d'alcool pour une seule personne. il n'attend évidemment pas la réponse de junha pour se servir un verre de gin et le vider d'un trait, geste naturel pour lui. « or you know what, you can get it yourself. make yourself comfortable, dude. you're at home. »

junha aurait pu danser sur ce plancher instable tant il se fichait du lendemain, en si belle compagnie. peu de place aux doutes et adieu ses responsabilités, mais la soirée prend fin trop vite et une fois séparé de sieon, il recommencera à se poser les mêmes putain de questions. où dormira-t-il dans une semaine, un mois, un an ? peut-il vraiment continuer comme ça, ou combien de temps avant de flancher ? il se repose sur la musique et les encouragements qu’il reçoit de ses modestes admirateurs, mais il s’épuise junha. il le sent quand il ne peut plus courir aussi longtemps qu’avant, ni grimper trop haut. les creux de son estomac ignorés ou comblés par le café et si sa mère le voyait… le remarquerait-elle ? avec sieon il oublie, mais voilà qu'il délire. alors quand sieon laisse entendre qu’ils passeront la nuit ensemble (chez lui), ses yeux brillent à nouveau. encore plus lorsqu'il lui promet le confort d'un lit. « awooo yeah!! » il lève les bras tel un vainqueur et même si la nouvelle l’excite comme une puce, il reste calme durant le trajet. et ce n’est qu’à l’arrivée qu’il se permet de retrouver son entrain, non sans glisser quelques commentaires taquins au passage.

en effet, après avoir salué naughty wilbur, junha s’est aventuré dans la cuisine où il aurait pu signer son arrêt de mort. sous-entendre que sieon néglige son chien n’était qu’une boutade et le ton sérieux ne l’impressionne pas, la première fois. « i’m sure he does, this cut- » puis jun se retrouve coincé contre le comptoir et avant qu’il n’ait pu y réfléchir, il baissait déjà les yeux. plus par réflexe que réelle intimidation, mais le voilà qui se demande à quoi ressemblerait un sieon énervé. « i wasn’t implying anything! » se défend-il enfin en glissant de côté pour se libérer et rejoindre le petit animal. sans peur, il l’attrape pour le combler de caresses et de câlins pendant que l’hôte des lieux se sert généreusement en alcool. « what d’you have? » il doute trouver quelque chose d’aussi pur qu’une limonade dans son frigo, mais il tente tout de même sa chance lorsqu’on lui laisse le choix. se sentir comme chez lui et agir en tant que tel sont deux choses différentes. l’une est une forme de politesse, où l’on attend un minimum de retenue malgré tout. quant à l’autre, elle semble prendre effet ce soir. sieon a même commencé à se déshabiller et le degré de familiarité entre eux vient de grimper alors, pourquoi se gêner ?

le musicien relâche le chien et s'empare de la bouteille pour se servir un fond de gin dans un verre, qu’il choisit de mélanger avec du jus de fruit. objet rare dans le frigo, tel un trésor caché entre les bières et les bouteilles d'alcool entamées. « at home? haha don’t say it like that.. » ou il pourrait le prendre au mot, mais il est encore trop sobre pour ce genre de propos chaleureux.  jusqu'où sieon compte se montrer généreux avec lui ? et pourquoi, même ? il pourrait s’entourer de personnes mieux que lui. l'héberger une nuit est déjà bien gentil et inconscient. il pourrait vraiment être un psychopathe, l'un comme l'autre d'ailleurs. ah, quelle idée. il s’enfile la moitié du verre, s’éloigne vers le salon et pris d'un gain de confiance, retire son t-shirt sans pudeur. « if you don’t mind? » il s’étire alors les bras et le dos en soupirant, son regard porté vers une grande fenêtre. « nice view. nice everything, i like it here. » mais tout paraît mieux qu’une chambre miteuse, sûrement et il fait le tour de l’endroit pour se repérer aussi bien que par curiosité. quand il revient, c’est pour siroter la fin de son verre et embêter naughty wilbur avec son pied. « now what? we’re drinking ‘til we collapse? or… we could just lie down somewhere and talk. » même si le plafond n’est pas aussi impressionnant qu’un ciel étoilé, c’est tout de même ce qu’il avait prévu pour la soirée. un moment de tranquillité.

il retrouve vite ses aises, parce qu'il est chez lui, parce que junha est là avec lui. comme deux bons vieux amis et pas simplement deux inconnus qui se retrouvent de temps à autres pour tuer le temps, sieon rit, le taquine, s'amuse des yeux qui évitent son regard et du corps qui échappe au sien pour rejoindre le chien comme si c'est pour lui qu'il est venu. « i hope the fuck you weren't, » ricane-t-il par dessus son épaule en se dirigeant vers le réfrigérateur qui lui sert d'armoire à pharmacie. la réponse à tous ses maux (et la cause d'autres) se trouve dans les multiples bouteilles qu'il renferment. « uh, everything, répond-il comme si c'était une évidence dont junha devait se douter, if it's not there it means i already drank it. » les habitudes difficiles à chasser, c'est un miracle même qu'il y ait encore des boissons à se servir vu la fréquence à laquelle il en consomme. avant de sortir, puis après être rentré, comme le biberon du soir. son corps profané parce qu'il en fait, sieon attend la fureur divine qui fera tout s'arrêter.

en attendant, il profite. de la vie, des brefs moments où il n'en guette pas la fin avec impatience. roi dans son antre, il a l'impression d'avoir l'éternité devant lui et invite junha à en faire de même, à se laisser aller au même confort. « why not? » soupire-t-il avec un haussement d'épaules, insouciant. qu'importe qu'ils ne se connaissent pas si bien que ça, qu'importe que l'un n'ait aucune idée de ce dont l'autre est capable. il veut que son invité se sente chez lui, pour que lui aussi soit allégé du malaise qui lui pèse dessus quand il se retrouve seul entre ces quatre murs. il récupère la bouteille et se resserre un verre qu'il sirote plus lentement cette fois, accoudé sur le comptoir et les yeux suivant le musicien pendant qu'il se déshabille. ses pupilles glissent sur ses épaules largent, suivent la courbe de son dos sans retenue. « why would i? » les lippes étirées en un large sourire et ses yeux brillent d'une étincelle vive, nourrie par l'alcool qui réchauffe ses veines. pas de pudeur ici, la nudité ne le dérange pas et il apprécie même la vue que junha lui offre, bien qu'il se garde de faire un commentaire — son regard indiscret s'en occupe à sa place. sieon le rejoint au salon, traîne derrière lui pendant qu'il visite distraitement les lieux, ravi de le voir les apprécier. « i'm glad you do. feel free to stay here as much as you want. » quelque part entre les notes qui s'échappent de ses lèvres, ça sonne comme une imploration, une supplication de rester, remplir le vide qui menace sans cesse de l'engloutir. junha le fait si bien. il n'a pas le temps de penser à la désespérance de sa requête qu'il rit encore, le regard tendrement baissé vers son chien qui se délecte de l'attention.

« that sounds good to me. » réaction prévisible à la première partie de sa phrase et sieon y répond en ancrant son regard dans le sien tout en vidant son verre en une gorgée, le sourire espiègle quand il le repose sur le comptoir. « wow, you sound like you really need to talk. » il pouffe de rire, éternellement taquin, attendri par la douceur de cette proposition. pourtant, ses mots s'appliquent à lui aussi. il aime parler, il a besoin de parler, ça lui fera du bien. alors il n'hésite pas avant de prendre son verre dans une main et la bouteille dans l'autre, direction sa chambre. « okay, come here baby. » c'est naughty wilbur qui le suit en premier, mais les mots étaient bel et bien adressés à junha. sieon pousse la porte du bout du pied et s'aide de son coude pour allumer la lumière. il libère ses mains en déposant la boisson sur la table de nuit puis se défait de sa chemise qu'il remplace par un t-shirt trop large pour lui. « do you want something to wear? » demande-t-il avant de fermer son placard. « this isn't me suggesting that you should get dressed, by the way. you can totally stay like that. if you want. » un regard suggestif lancé vers le plus jeune et il éclate de rire avant de se resservir puis se jeter sur le lit, le verre en main et quelques gouttes d'alcool s'écrasant au sol avant qu'il n'allège le verre de son contenu. « so, what do you think? super comfy, right? »

la chaleur des lieux le berce d’un sentiment familier et au fil des minutes, junha se détend. il baisse sa garde, se met à l’aise et finalement, il est bien facile de se sentir comme chez lui. la compagnie de sieon et son chien n’y sont pas pour rien. cependant, il y a dans son coeur comme un signal d’alerte et les barrières lentement se referment. « because i’ll have to leave tomorrow anyway. » il pourrait étaler ses émotions et les désirs enfouis de son coeur blessé, mais il a depuis longtemps appris à se protéger. il sent la sincérité de sieon pourtant et le remercie pour sa gentillesse, mais il tient à garder les pieds sur terre. « i don’t belong anywhere. i’m fine with it tho. » sur ces mots, il s’allège de quelques matières gênantes pour laisser respirer sa peau et parcourir un peu l’appartement. pas de pudeur entre eux et pour le peu que junha en sait, sieon n’en a avec personne. il lève son verre comme pour trinquer avec son ami, mais le descend bien moins vite que lui. un doux rire lui échappe, mais il ne peut ignorer la quantité d’alcool qui traîne en ces lieux – ni la fréquence à laquelle sieon la consomme, il suppose. les sous-entendus qui parfois lui échappent prennent sens, même si junha ne peut que supposer. et derrière ses blagues et taquineries, le musicien s’inquiète. comme lui, sieon semble se perdre et s’il ne peut l’aider à retrouver son chemin, il aimerait au moins lui prendre la main et chercher la sortie ensemble. un faux pas et il pourrait perdre ça, retourner à la case départ. puis sieon rebondit sur ses suggestions pour la soirée et la remarque le braque aussitôt. « what– i don’t need to! it’s just to kill time. » l’embarras colore ses pommettes et sa petite fierté se sent attaquée alors qu’au fond, oui, il aurait sûrement besoin de parler à quelqu’un. mais il préfère écouter les autres cela dit.

quand sieon l’appelle à le suivre vers sa chambre, le brun lève les yeux au plafond et s’exécute sans relever le petit nom affectif, qui malgré lui étend ses rougeurs jusqu’à la pointe de ses oreilles. il est encore plus gêné quand naughty wilbur le devance, comme s’il réalisait à qui ces mots étaient réellement destinés. est-ce parce qu’il est chez sieon qu’il se laisse autant affecter par ses taquineries ? à l’aise, mais pas trop. la première chose qu’il fait en arrivant dans la chambre, c’est de s’asseoir au bord du lit pour en tester la qualité. en un battement de cils sieon était changé. « i’m good like that. uh wait… maybe not. » il réalise qu’un jean n’a rien de confortable pour dormir et il se lève pour rejoindre le placard à son tour. le pantalon qu’il choisit est si long qu’il n’aura pas à s’inquiéter pour ses pieds. ils resteront au chaud pour sûr. « i can’t sleep with shirts on, but pants are okay. » il revient sur le lit et s’allonge de tout son long, les yeux fermés avant que sieon n’attire une dernière fois son attention.

sa question reste en suspend quelques secondes, comme si junha cherchait ses mots alors qu’une réponse simple l’attend – oui ou non. mais ce sont d’autres réponses qui traversent son esprit fatigué et d’autres questions plus indiscrètes, qu’il gardera pour lui dans tous les cas. « you should go easy. » il hoche la tête vers son verre déjà vide, mais se penche ensuite pour attraper la bouteille et se servir lui-même sans modération. il s’installe contre la tête de lit et tapote le matelas. « but yeah, the comfier i’ve been on for a while. » un sourire large fend son visage et il descend la moitié du verre, non sans une grimace, comme s’il avait oublié la pureté du breuvage. « so… what’s his story? tell me you have pictures of baby naughty. » demande-t-il en accueillant le petit chien sur le lit, ayant presque oublié sa présence avant qu’il ne se manifeste. il s’amuse un peu avec lui avant de l’inciter à s’installer entre eux deux. il peut ainsi prêter attention à ses deux hôtes. c’est de loin la soirée la plus paisible qu’ils aient connu ensemble, une où junha ne se sent ni pressé, ni exposé. safe.  

« why? you got something to do? » sieon inconscient des doutes que recèlent les mots de junha, il ne s'en rend compte que des secondes plus tard et le besoin de le rassurer s'empare aussitôt de lui. « cuz if not, you can stay as long as you want,  lance-t-il pour se rattraper, le ton assez nonchalant pour montrer sa sincérité en toute transparence, « seriously. » il ne sait presque rien de junha, ils se connaissent à peine, pourtant il est prêt à l'accueillir chez lui aussi longtemps qu'il le désire. et s'il est là uniquement pour voler son argenterie ou le tuer dans son sommeil, so be it. tant qu'il prend soin de son chien, qui a l'air de l'apprécier. « fine, whatever. let's kill time, then. » lui non plus n'a pas envie d'admettre ses vulnérabilités devant junha — au fond, il a l'impression que celui-ci saura les déceler sans qu'il n'ait besoin de parler. et c'est rassurant.

le confort est à son comble lorsqu'il se libère de ses vêtements et retrouve son lit, junha le rejoignant rapidement avant de lui offrir une vue dont il ne se plaindra pas. « i'm not complaining, » confesse-t-il à voix haute, les lippes courbées et les sourcils haussés en un air plus taquin que jamais. ils prennent tous les deux leurs aises l'un avec l'autre et même si c'est habituel pour sieon la chaleur est encore plus douce avec le musicien, comme une impression d'y être destinés. « what are you, my mom? » il ricane au creux de son verre qu'il vide puis remplit aussitôt, rien ne saura le persuader de l'abandonner — à part sa position allongée qui rend la dégustation difficile. « unfortunately, i don't. he was already that big when i stole him, » murmure-t-il, les yeux rivés sur le plafond et l'alcool commençant tout juste à lui faire tourner la tête det cet étourdissement délectable. « oh right, you don't know the story! » la voix s'élève avec enthousiasme et il rit tout seul avant de commencer sa narration. « long story short, he was owned by some asshole who didn't treat him right, so i took him to give him the life you deserve. and guess what? the guy got hit by a car when he tried chasing me! that's a fucking divine intervention right there. » le rire se fait plus élevé, plus fier, toujours ravi de ressasser cette histoire et d'avoir eu les dieux de son côté, pour une fois.

« what about you? » sieon se tourne sur le côté et s'appuie sur son coude, l'attention entièrement portée sur junha. ses yeux brillent d'un éclat curieux, presque enfantin, comme s'ils venaient de se poser sur un trésor qu'il a longtemps cherché. « what's your story? »

« i’ll… think about it. thanks. » l’insistance est subtile, mais présente et la proposition lui fait chaud au coeur. ce ne serait pas la première fois qu’on accepte de l’héberger, mais ce n’est pas vraiment la même chose. il ne lui demandait rien et même s’il pourrait profiter de la richesse de ce beau garçon, il n’en fait rien. il s’allège de ses vêtements à défaut d’alléger le poids de ses problèmes et les taquineries lancées par sieon le font sourire. son regard ne le dérange pas, mais il l’embarrasse tout de même un peu. ils sont installés sur le lit avec un verre de gin et des lumières tamisées, alors c’est peut-être le cadre entier qui l’impressionne. « what if i just care? » il lève les yeux au plafond et y reste pour l’admirer, le temps de changer le sujet vers le petit chien qui leur tient compagnie au pied du lit. c’est toute une responsabilité d’élever un animal et il est curieux de connaître leur parcours. lui qui rêverait d’adopter un chaton, pourrait bien se consoler avec une histoire de chiot. mais c’était avant que sieon lui avoue avoir volé naughty wilbur. « what the hell? » il a une pointe d’admiration dans la voix et se redresse pour lui accorder toute son attention. l’histoire du pauvre chien lui fend aussi bien le coeur qu’il le réjouit, car elle a connu une fin heureuse. « the bastard deserved it, yeah. » il n’a rien que du mépris pour ces gens qui maltraitent ou abandonnent les animaux. il n’y a rien de plus innocent en ce monde, même un tigre trouverait plus de grâce à ses yeux qu’un être humain, car eux ne s’entretuent que pour survivre. « i’m glad naughty wilbur met you. » un sourire ravit son visage et de longues secondes passent ainsi, paisibles jusqu’à ce que l’attention change de cible.

« me? » le sourire vacille et son regard tombe sur les draps tandis que le coeur panique. « there’s nothing to say. » c’est tout le contraire en vérité, mais il n’est pas de ceux qui aiment parler d’eux-mêmes. peut-être parce que sa vie est un échec de a à z, que la honte le suit constamment et que la chance se refuse à lui. sieon lui donne l’occasion de s’alléger un peu, mais il craint déjà de le décevoir ou pire, de perdre son intérêt. l’ambiance s’y prête, confortablement installé sur un lit qui n’est pas le sien et sous le regard attentif d’un homme dont il ne sait pas grand-chose non plus, finalement. il lui ferait pourtant assez confiance pour accepter de rester ici. alors pourquoi ne pas s’ouvrir un peu ? en levant les yeux vers sieon, il comprend que ce dernier ne laissera pas tomber si facilement. mais sans insister et en silence, le plus grand patiente.

« i almost entered the royal guard, years ago. i tried my very best and failed. pretty lame, isn’t it? yeah… so, truth is my mom never really cared about me. became worse after that and i left everything behind. » il a du mal à tenir le regard de sieon et il finit par retrouver son ami le plafond, le coeur battant sous l’adrénaline que ces confidences ont réveillée. il évite généralement le sujet de sa mère, qui même s’il s’en est détaché, l’affecte toujours un peu. l’indifférence ressentie envers sa mère désormais ne supprime pas toutes les années passées à souffrir de son indifférence à elle. il y a d’autres choses cachées en son coeur, mais qu’il n’est pas encore prêt à admettre même envers lui-même. « at the time, i found peace in composing. i’m better at writing than… speaking. lucky you i guess. » il rit nerveusement en torturant ses lèvres et ses doigts, inconsciemment. il avait peut-être vraiment besoin de parler au final, pense-t-il et ça le fait rire une fois de plus.  

« well then don’t, it’s that easy. » très peu pour lui qu’on se soucie de son état. sieon ne sait pas ce qu’il fait et il en est pleinement conscient ; chaque erreur qu’il commet est un choix délibéré, comme un besoin de se foutre en l’air plus encore, d’aller jusqu’au point de non retour tant qu’à faire. la bienveillance de junha devrait le vexer, pourtant il ne peut s’empêcher de se sentir réconforté par l’attention qu’il lui porte. venant de sa part elle ne semble pas être un signe de pitié mais plutôt de compréhension, et bien qu’il n’ait aucune réserve d’ordinaire, il se sent d’autant plus à l’aise de se confier à junha. la première histoire qu’il lui conte est celle de son chien, bravement sauvé sur un coup de tête des griffes de son dernier maître. « i know, right! i’m glad too. » sieon s’étire pour caresser la tête du chien du bout du pied. sa compagnie égaie même ses pires journées et parfois, quand il repense à la façon dont il l’a sauvé, il se dit qu’il n’est peut-être pas un cas aussi désespéré qu’il pense.

en échange, il quémande à junha son histoire et toute son attention se porte vers lui, faisant preuve d’une patience inhabituelle en attendant qu’il se prononce. « only people who have a lot to say say that, » argumente-t-il. tout le monde a une histoire, et quand bien même sieon avait l’habitude de sortir la même réplique que junha quand il ne voulait pas raconter la sienne, il avait envie d’écouter celle du plus jeune. « the royal guard? shitttt. » impressionné et il ne le cache pas. les mots l’atteignent et son regard pensif se perd sur les traits de junha alors qu’il réalise ce qu’ils ont en commun ; ses parents ne se soucient pas de lui. si c’était le cas. ils n’auraient jamais fait ce qu’ils ont fait. dure vérité qu’il confronte enfin, elle lui semble maintenant si évidente et il désire s’en distraire à tout prix. « my real father is the king’s brother. not that it’s relevant in any way, just thought i’d throw that in there. » ses lippes s’étirent en un sourire presque arrogant, les réactions qu’il reçoit l’amusent énormément pourtant il ne ressent aucune fierté envers ce lien du sang. il oublie souvent qu’il existe.

« yeah, leave the speaking to me, i’m really good at it. ricane-t-il, you’re great at composing though, your music seriously slaps. » sincérité indéniable, sieon ne cache pas son admiration envers le talent du plus jeune, bien qu’il ne soit pas ce qui l’a attiré le plus chez lui. quand il réalise que c’est son tour de parler, il soupire avec résignation et imite la position de son ami, les yeux perdus au plafond alors qu’il s’allonge sur le dos. « guess i’m the same as you, admet-il candidement, i was working on rebuilding a poor neighborhood but my parents thought it would be better if they razed it to the ground and built a hotel instead. they went behind my back and financed the project, then i lost a friend during protests so i just said fuck it and walked away from everything. » résumé condensé, survolant tous les détails de sa descente et sa débauche, bien qu’il n’hésite pas à revenir dessus ne serait-ce que pour les faire rire. « and then i went batshit crazy and now all i do is get drunk and do drugs but hey, who gives a shit, right? » son regard retrouve celui de junha, le sourire plaisantin et espiègle, comme s’il ne souffre plus de tout ce qu’il vient de décrire. sieon porte les conséquences de son vécu comme un fardeau, mais la présence de junha les rend plus légère. comme s’ils portaient le poids à deux. « nothing makes fucking sense. nothing matters. » il marmonne tout bas, sa voix basse empreinte d’une amertume qu’il s’empresse de chasser avec une gorgée d’alcool. « let’s drink to that, yeah? » s’exclame-t-il en se resservant, le verre vidé d’un trait avant de le remplir une nouvelle fois et le porter vers junha. « to us losing our shit and then finding each other… or something corny like that. »