calme,
sagesse, agreste.

au gré d’un hélianthe doré, elle s’apaisait. ses jours s’écoulaient, se mélangeaient. malgré une sempiternelle querelle familiale, elle ne se sentait pas si mal. elle s’octroyait du temps pour respirer, pour soupirer. elle devait s’éloigner, se retrouver. seule à seule, avec elle-même. parce qu’elle était toujours entourée, surveillée. épiée. à croire qu’elle ne pouvait tranquillement se mouvoir ; ô désir illusoire.

douce journée, percée solaire.
vaporeuse, mousseuse.

ainsi se présentait cette clarté. aujourd’hui, elle avait décidé de ne pas mettre le nez au conservatoire. nulle mélodie n’hanta sa boîte crânienne, nulle corde ne fût malmenée par ses tiges osseuses. aujourd’hui, elle avait refusé de répondre à ses obligations. cela faisait longtemps. qu’elle n’avait pas dit non, qu’elle n’avait pas refusé de paraître au lieu d’être.

de subsister ;
au lieu d’exister.

ses tympans étaient habités d’une paire d’airpods, ses phalanges tâchées. à la table d’un café, elle dessinait. esquissait, estompait. cela faisait des heures qu’elle était assise. à siroter des jus de fruits, à déguster des pâtisseries. l’endroit s’emplissait, se désemplissait.

vagues humaines ;
vague à l’âme.

son verre était vide, sa gorge sèche. tout naturellement, elle fît signe au serveur — commandant à nouveau. elle voulait terminer son dessin avant de s’en aller, sans quoi elle savait pertinemment qu’elle ne le terminait jamais. lassée, blasée. cependant, lorsque sa commande arriva, quelque chose l’interpella.

ses sourcils se froncèrent ;
son nez se plissa.

« — Excusez-moi, il doit y avoir erreur. Je n’ai pas commandé cela, j’avais demandé un jus de pamplemousse.
— Vous en êtes certaine ?
— Bien sûr, demandez donc à votre collègue.
— C’est étrange, c’est pourtant ce qui était marqué.
— Vous vous êtes certainement trompé de numéro de table ».

à cet instant, le serveur semblait perdu. égaré, déphasé. il devait être nouveau, angoissé par cette foule adjacente. face à cette détresse, anna s’empara du papier qui était posé à côté de la commande. elle se retourna alors, tentant de voir si quelqu’un semblait attendre sa consommation.

« — Quelqu’un a commandé un thé au miel ainsi qu’une tarte meringuée ? ».

17h32

Heures de travail terminées, la jeune femme était sortie du palais. Elle ne voulait pas y rester. Après s’être assurée que Kibeom son meilleur ami, allait bien, elle sortit, direction un café. Mais sa gorge la faisait souffrir, alors pas de café pour elle aujourd’hui mais un thé au miel qui ferait du bien à ses cordes vocales malmenées. Les deux derniers jours avaient été chaotique dans sa vie. D’une simple soirée animée avec son meilleur ami à une bagarre le lendemain matin avec ce dernier et Eden…L’ex de Yerin, ex qu’elle aimait encore par dessus le marché. Evidemment, voir les deux hommes qu’elle aimait -certes différemment- couverts de blessures diverses ne l’avait pas aidée à se sentir mieux. Au contraire, sa culpabilité avait augmenté, et elle se sentait horriblement désolée envers Kibeom qui avait été là dans les moments difficile de son existence et qui aujourd’hui s’était fait tabassé presque gratuitement. Les pensées fumantes, la belle brune voulait s’aérer, d’où sa présence dans ce café.

Elle s’était installée à une table libre et passé commande. Les yeux perdus dans le vide et dans un torrent de pensées plus ou moins sombres, Yerin ne remarquait même pas que sa commande n’arrivait pas. C’est quand une voix l’interpella qu’elle comprit que le serveur s’était trompé. L’ancienne noble se lève avant de regarder la personne qui détenait sa commande.

« Je crois que cela m’appartient » clama Yerin simplement, regardant le serveur et la jeune femme.

Le temps semble s’être arrêté le temps de quelques secondes. Le malaise du serveur était palpable et celui-ci se confond en excuse alors qu’il s’empresse d’amener la commande à la bonne personne cette fois. Yerin regarde le serveur et lui fait juste un geste de la main pour lui dire de disposer. Décidément, rien n’allait en son sens aujourd’hui. Des fois elle se demandait si ce n’était pas ce qu’elle méritait pour ce qu’elle avait fait subir aux autres. Le karma la punissait. La brune se rassoit dans un soupire, espérant cette fois savourer son temps libre…Elle espérait.

sereine ;
olympienne.

cela faisait des lustres qu’elle ne s’était pas sentie apaisée — reposée. Au gré d’un après-midi ensoleillé, le repos s’était offert à elle. divin, souverain. elle avait fui ses responsabilités, ses habilités. son cellulaire était éteint, ô combien coupée du monde.

à cet instant ;
le commun des mortels ne l’intéressait guère.

elle quémandait de l’air.

une liberté,
— méritée.

« — Je crois que cela m’appartient ».

ô voix féminine,
elle qui attira les regards.

nullement place au hasard, cette commande était sienne. désolé, chagriné — ainsi était le serveur. ses lèvres déversaient des excuses ; incessantes. pourtant, ces paroles ne parvenaient aux oreilles d’anna. son esprit était dérangé, son entendement était boulversé. elle s’interrogeait, se questionnait.

puis, il disparût.

les iris de la môme wang étaient dirigées en direction de cette femme. celle à qui appartenait le thé au miel, celle qui avait commandé une tarte meringuée.

cependant,
elle était intriguée.

son faciès, elle avait l’impression de le connaître. de l’avoir vu quelque part, de l’avoir entrevu. elle savait qu’elle ne la connaissait pas réellement, qu’elles s’étaient certainement croisées. interrogation qui ne trouvait guère de réponse. ses yeux s’étaient froncés, son nez s’était plissé.

elle cherchait ;
inlassablement.

anna se pensait discrète, secrète. cependant, elle la dévisageait. littéralement, entièrement. l’avait-elle vu dans un magasin ? l’avait-elle aperçu au conservatoire de musique ? l’avait-elle rencontré à une soirée ? l’avait-elle croisé dans la rue ?

elle n’en avait aucune idée, et pourtant elle avait l’impression de la connaître.